Tout notre être aspire à l’infini : notre cœur rêve de l’amour infini, nos yeux rêvent d’espaces infinis, il arrive que notre ventre rêve d’un festin sans fin et que nos oreilles recherchent l’harmonie parfaite !

Or, nous le savons bien – et la période troublée que nous vivons ne fait que le révéler encore davantage – : la vérité de notre vie est toute autre ! Nos moyens, nos capacités, notre monde même sont finis ! Et la sagesse humaine consiste bien souvent à s’accepter soi-même tel que l’on est, tel que les événements de la vie nous ont construit, et accepter aussi le monde et notre époque telle qu’elle est !
Mais alors, notre désir d’infini est-il infondé ? Est-il une supercherie qui nous fait souffrir et faudrait-il dans ce cas y renoncer ?

Il y a quelques années, Sœur Chiarana, une moniale de Bethléem, au moment de témoigner auprès du petit groupe de la Bible sur le Terrain – un pèlerinage tout à fait original, en Israël – nous avait dit : « La clôture monastique nous aide à regarder le véritable horizon : le Ciel ».
Assurément radical pour nous qui vivons souvent à l’horizontal, il me semble que cette remarque peut nous aider à convertir notre regard sur nos finitudes : Seraient-elles une aide pour nous orienter vers le véritable infini ? Autrement dit : n’est-ce pas une illusion de désirer un infini temporel, ou spatial, ou gustatif, ou mélodique ? Ou plutôt ne faut-il pas s’appuyer sur tous ces appels à l’infini pour tendre vers le seul infini réel : l’Amour divin.

Mais alors, comment vivre de l’infini divin dans le cadre tellement fini de notre monde et de notre vie ? Figurez-vous que c’est le secret de Jésus : le Dieu fait homme, l’infini amour s’écoulant dans une vie parfaitement humaine et limitée à un temps, un lieu, un corps et une âme humaine !!! Dans la finitude de la vie de Jésus de Nazareth, la totalité de la vie de Dieu était présente, et au large même dans son cœur !
Tel est le vrai sens du mot catholique : non pas simplement « universel » mais « plénitude dans la finitude » à la manière dont saint Paul dit du Christ : « En lui habite corporellement la plénitude de la divinité » (Col 2,9). Telle est la grande révélation (en grec : « apocalypse ») que le Seigneur a apporté au monde : dans la fragilité et la finitude de notre vie, un infini peut tout éclairer. A vrai dire « un seul » : L’amour de Dieu communiqué en Jésus Christ.

Que cela éclaire également les prochains dimanches du mois de novembre, traditionnellement consacrés aux annonces apocalyptiques du Seigneur : accueillons-les comme des promesses que la finitude du monde peut refléter la plénitude de vie du Créateur. Et que toutes les clôtures que notre vie, notre monde et cette épidémie nous imposent, peuvent devenir des aides pour accueillir et répondre à l’unique infini : la plénitude d’amour de Dieu en Jésus de Nazareth.

Alors, soyons véritablement catholiques ! Dans les limites que cette vie et cette épidémie nous imposent, gardons le cœur uni à l’infini !

Père Etienne GUIBERT