Ce que ce moine m’a dit sur la colère… et que je n’ai jamais oublié

Religion

Par EgliseRoanne

Ce que ce moine m’a dit sur la colère… et que je n’ai jamais oublié

Je me souviens encore de cette journée où ma quête spirituelle m’a conduit au monastère de La Pierre-qui-Vire, niché dans le Morvan. Le ciel était chargé de nuages gris, miroir parfait de mon âme tourmentée. J’avais alors trente-cinq ans et portais le fardeau d’une colère tenace envers un ancien collègue qui m’avait, selon moi, trahi professionnellement.

La rencontre inattendue avec Frère Thomas

C’est lors de cette retraite spirituelle que j’ai fait la connaissance de Frère Thomas, un moine bénédictin aux yeux clairs et aux rides profondes témoignant de ses soixante-quinze années de vie. Son visage reflétait une sérénité que je n’avais jamais observée chez quiconque auparavant.

Après une messe particulièrement émouvante, je me suis retrouvé à marcher avec lui dans le cloître. La conversation dériva naturellement vers mes tourments intérieurs. Je lui confiai alors ce ressentiment qui me rongeait depuis des mois, cette colère viscérale qui empoisonnait mes pensées.

« Nicolas », me dit-il d’une voix douce mais ferme, « savez-vous ce qu’est véritablement la colère ? » Je m’apprêtais à lui donner une définition convenue, mais il poursuivit : « La colère est une lettre que vous écrivez mais n’envoyez jamais, tout en attendant désespérément une réponse. » Cette phrase me laissa sans voix.

Frère Thomas m’expliqua alors que la tradition monastique considère la colère comme l’une des passions primordiales à maîtriser. Saint Jean Cassien, dès le Ve siècle, l’avait classée parmi les huit pensées mauvaises fondamentales, avant même que ne soit établie la liste des sept péchés capitaux.

Les quatre vérités spirituelles sur la colère

Ce que ce moine m’a révélé ce jour-là a bouleversé ma conception de cette émotion tumultueuse. Il m’a enseigné quatre vérités essentielles que je porte encore en moi aujourd’hui :

  1. La colère n’est pas votre ennemie, mais votre messagère – Elle signale une blessure profonde qui mérite attention et guérison
  2. Celui qui se met en colère souffre deux fois – D’abord de l’offense initiale, puis du poison émotionnel qu’il s’inflige
  3. La colère non exprimée se transforme en ressentiment – Elle devient alors un fardeau encore plus lourd à porter
  4. Le pardon n’est pas un cadeau à l’autre mais à soi-même – Il est l’acte de libération ultime

« Voyez-vous, » me confia-t-il alors que nous nous arrêtions près d’un rosier en fleur, « la colère momentanée peut être comme un orage d’été qui purifie l’atmosphère. Mais la colère qui s’installe est semblable à une eau stagnante qui empoisonne tout ce qui vit en elle et autour d’elle. »

Je me souviens avoir objecté que certaines colères semblaient légitimes, particulièrement face à l’injustice. Son regard s’illumina d’une sagesse profonde : « Même Jésus s’est mis en colère dans le Temple. La question n’est pas d’éliminer la colère, mais de la transformer en force créatrice plutôt qu’en force destructrice. »

L’art de transmuter la colère en sagesse

Frère Thomas m’invita à m’asseoir sur un banc de pierre et me confia une méthode ancestrale pratiquée par les moines depuis des siècles pour apprivoiser cette émotion fougueuse. Il l’appelait « le chemin des quatre R » :

Étape Pratique monastique Application quotidienne
Reconnaître Examen de conscience Observer l’émotion sans jugement
Respirer Prière silencieuse Créer un espace entre le stimulus et la réaction
Réfléchir Méditation contemplative Chercher la blessure sous-jacente
Réorienter Conversion du cœur Transformer l’énergie en action constructive

« Savez-vous pourquoi cette méthode fonctionne depuis des siècles ? », me demanda-t-il. « Parce qu’elle ne nie pas la colère, elle la respecte comme messagère avant de la transmuter. »

Cette conversation avec Frère Thomas a eu lieu il y a presque quinze ans, mais ses paroles résonnent encore en moi. Récemment, face à une situation professionnelle injuste au sein de notre équipe éditoriale, j’ai ressenti cette flamme familière monter en moi. J’ai alors appliqué les enseignements de ce sage moine.

Plutôt que de me laisser consumer, j’ai transformé cette énergie en force créatrice, rédigeant un article profond sur la justice et la compassion qui a touché de nombreux lecteurs de notre communauté paroissiale.

Un héritage spirituel inestimable

L’enseignement le plus précieux que ce moine m’a transmis est que la colère, comme toute émotion humaine, fait partie de notre nature créée à l’image divine. Ce n’est pas l’émotion elle-même qui pose problème, mais ce que nous choisissons d’en faire.

Saint Basile le Grand écrivait que « la colère est un nerf de l’âme ». Frère Thomas m’a appris à utiliser ce nerf non pour blesser, mais pour sentir plus profondément et agir avec plus de justesse dans ce monde complexe où nous sommes appelés à être des témoins de paix.

En partageant cet enseignement avec vous aujourd’hui, j’espère transmettre un peu de cette sagesse qui continue d’illuminer mon chemin. Car les paroles de ce moine sur la colère sont véritablement un trésor que je n’ai jamais oublié.

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