J’ai passé le ramadan avec une famille musulmane : ce que j’ai compris va bien au-delà du jeûne

Religion

Par Nicolas

J’ai passé le ramadan avec une famille musulmane : ce que j’ai compris va bien au-delà du jeûne

J’ai récemment eu l’honneur d’être invité chez la famille Benali pour partager leur expérience du Ramadan. Avec mon expérience de pratiquant catholique, cette immersion m’a profondément touché et m’a permis de découvrir une dimension du jeûne musulman que je n’avais jamais saisie auparavant. Je voudrais aujourd’hui partager avec vous cette expérience enrichissante qui va bien au-delà de la simple privation de nourriture.

La découverte d’une spiritualité familiale

Lorsque j’ai franchi le seuil de leur maison, j’ai immédiatement été saisi par l’atmosphère particulière qui y régnait. Une sérénité palpable, un calme propice à la méditation et au recueillement. Monsieur Benali, père de trois enfants, m’a accueilli avec une chaleur qui contrastait avec la rigueur du jeûne qu’il observait depuis l’aube.

Ce qui m’a frappé d’emblée, c’est la manière dont le Ramadan transforme profondément le rythme et l’organisation de la vie familiale. Les repères temporels sont modifiés, les habitudes bouleversées. Pourtant, loin d’être vécu comme une contrainte, ce chamboulement semble créer un espace-temps privilégié où chacun se recentre sur l’essentiel.

Un soir, alors que nous attendions l’appel à la prière pour rompre le jeûne, leur fille aînée m’a confié : « Le Ramadan, c’est le mois où je me sens le plus proche de mes parents et de mes frères. » Cette phrase a résonné en moi. N’est-ce pas là une quête universelle que nous partageons tous, croyants de différentes confessions, ce désir de communion avec nos proches et avec le divin ?

J’ai observé comment les membres de cette famille, privés de nourriture pendant la journée, semblaient paradoxalement plus disponibles les uns pour les autres. Moins distraits par les satisfactions immédiates, ils paraissaient plus à l’écoute, plus attentifs aux besoins d’autrui.

Les vertus universelles révélées par le jeûne

Au fil des jours passés auprès des Benali, j’ai pu identifier plusieurs vertus que cultive le Ramadan et qui font écho à notre propre tradition chrétienne du Carême :

  • La maîtrise de soi – Apprendre à dominer ses pulsions et ses désirs
  • L’empathie envers les plus démunis – Ressentir dans sa chair ce que vivent ceux qui souffrent de la faim
  • La gratitude – Redécouvrir la valeur des nourritures terrestres et spirituelles
  • Le détachement – Se libérer temporairement de l’emprise des biens matériels
  • La patience – Cultiver cette vertu cardinale dans l’attente du repas du soir

Un après-midi particulièrement éprouvant, alors que la soif commençait à se faire sentir, j’ai été témoin d’un geste qui m’a bouleversé. Monsieur Benali, apprenant qu’un voisin âgé était souffrant, s’est immédiatement proposé pour l’accompagner à l’hôpital, sans hésitation malgré sa fatigue évidente. Cette abnégation, cette capacité à se donner aux autres malgré ses propres privations, n’est-elle pas l’essence même de ce que nous appelons la charité dans notre tradition ?

Dialogue interreligieux autour de la table

Le moment de l’iftar, ce repas qui rompt le jeûne au coucher du soleil, a été pour moi l’occasion de riches échanges théologiques. Autour des dattes traditionnelles et du harira fumant, nos conversations ont tissé des ponts entre nos deux traditions.

Voici un aperçu des parallèles que nous avons pu établir entre nos pratiques respectives :

Pratique musulmane Équivalent chrétien
Ramadan (mois de jeûne) Carême (40 jours de pénitence)
Iftar (rupture du jeûne) Repas pascal (après le jeûne)
Zakat al-Fitr (aumône de fin de Ramadan) Aumône de Carême
Nuit du Destin (Laylat al-Qadr) Veillée pascale

Ce qui m’a particulièrement touché, c’est de constater combien nos traditions, malgré leurs différences théologiques, partagent cette intuition fondamentale : le jeûne comme voie d’accès privilégiée à une dimension plus profonde de l’existence. Il ne s’agit pas simplement de se priver, mais de créer un espace intérieur propice à la rencontre avec soi-même, avec les autres et avec Dieu.

En quittant la famille Benali après cette expérience marquante, j’ai emporté avec moi bien plus qu’un simple souvenir. J’ai acquis une compréhension plus riche de ce que signifie vraiment le jeûne dans son acception la plus noble – non pas une mortification stérile, mais une pratique vivifiante qui nous rappelle notre humanité commune et notre aspiration partagée vers le transcendant.

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